Arrêter de faire des recherches juridiques sur vos moteurs de recherche préférés et allez directement sur Doctrine.fr, le moteur qui ambitionne de devenir le Google du droit. Nicolas Bustamante, l’un de ses cofondateurs qui m’a fait l’honneur et la gentillesse de répondre à mes questions.
1/ Comment est né le projet Doctrine.fr
Nous sommes partis du constat dramatique que la jurisprudence française n’est pas numériquement accessible sauf à payer cher les abonnements des éditeurs juridiques. De là notre volonté de libérer le droit ! La technologie a été le moyen de cette libération. Nous travaillons sur les dernières innovations en big data et en machine learning, dont l’université de UC Berkeley en Californie où nous étions est l’un des fleurons. Nous avons commencé à trois avec Raphaël Champeimont (thèse en informatique), Antoine Dusséaux (Ecole polytechnique) et moi-même (ndlr Nicolas Bustamante, Ecole Normale Supérieure) puis très vite nous avons constitué une équipe, véritable task force pour la libération du droit, dont je suis très fier aujourd’hui.
2/ Pouvez-vous nous présenter l’équipe de Doctrine.fr
Nous sommes une équipe d’entrepreneurs, de juristes et de mathématiciens. Le grand challenge est de faire collaborer les mathématiciens avec les juristes afin d’analyser le génome juridique. Les profils sont tous pluridisciplinaires. A titre d’exemple, Hugo-Alexandre Dellinger a un master de droit de Paris I mais il est aussi doué en informatique, c’est à lui qu’on doit l’ajout de l’Autorité de la concurrence sur Doctrine.fr. De même, Antoine Riard a lui aussi une formation de juriste à Paris II mais chez Doctrine.fr il s’occupe du growth hacking (ndlr maketing numérique). Nous ne recrutons pas selon des fiches de poste. Nous recrutons des talents qui maitrisent plusieurs disciplines et surtout qui sont capables d’apprendre très vite un sujet si le besoin s’en fait sentir. Nous cherchons des personnes originales et très ambitieuses qui pensent hors du cadre traditionnel. Chez doctrine.fr, il n’y a pas non plus de période de recrutement, nous discutons en permanence avec des talents qui souhaitent rejoindre l’aventure de l’ouverture du droit. Ceci pouvant se faire de façon ponctuelle en nous rejoignant pour un projet spécifique qui vous tient à cœur. L’essentiel est de prendre du plaisir en travaillant.
3/ Comment fonctionne le moteur de recherche de Doctrine.fr?
Nous avons éliminé les cases à cocher, les opérateurs booléens et autres opérations qui complexifiaient la recherche juridique. Nos algorithmes comprennent l’écrit naturel, vous pouvez ainsi chercher : produit défectueux CASS depuis le 15 septembre 2010. La recherche juridique doit être plus simple que sur Google. Nous avons aujourd’hui volé la vedette aux Américains en ayant le moteur de recherche le plus rapide du monde avec un affichage moyen en 0,1 seconde. Nous concentrons actuellement nos efforts sur l’amélioration de la pertinence avec un algorithme qui se rapproche de celui de Google (Hummingbird). Sur la version premium, Doctrine apprend automatiquement de vos recherches afin de personnaliser vos résultats. Enfin nous associons aux jurisprudences de la doctrine de professeurs tels Bruno Dondero ou Anne-Marie Frison-Roche mais aussi des avocats spécialisés. Nous allons rassembler autour de la jurisprudence l’ensemble de ce contenu riche aujourd’hui épars sur internet.
4/ Quelles sont les décisions judiciaires que l’on peut trouver sur Doctrine.fr ?
Nous allons constituer le plus grand fonds de jurisprudence jamais crée. Nous disposons de l’ensemble des décisions de Légifrance, de la CEDH, de la CJUE mais aussi des AAI à l’instar de l’Autorité de la concurrence ou encore de l’INPI dont nous avons récemment obtenu la licence. Surtout, nous avons des partenariats avec des cabinets d’avocats et des organisations qui nous remontent leur base de jurisprudence. C’est une source inédite. Enfin, nous avons des robots qui cherchent des décisions automatiquement en permanence sur internet. Nous collectons des centaines de décisions par jour. L’objectif est simple : Le professionnel du droit doit accéder rapidement et gratuitement à l’ensemble de la jurisprudence française et européenne.
5/ Selon vous comment doit évoluer l’accès aux données juridiques en ligne dans les prochaines années?
L’open data est une lame de fond sociétale, c’est aujourd’hui une réalité qu’on ne peut nier. La mise en libre accès des décisions de justice est un droit fondamental qui résulte d’un principe constitutionnel. En France, la Cour de cassation et le Ministère de la justice sont pro open data et le gouvernement s’est engagé à de multiples reprises sur le sujet. C’est une chance en Europe notamment s’ils ont veut voir émerger des géants européens du numérique. Reste la mise en œuvre de l’open data compte tenu du faible budget de la justice. L’équipe de doctrine.fr est prête à aider techniquement à la réalisation de cet objectif. Nous avons déjà commencé le travail concret en rendant accessible des milliers de décisions exclusives. Notre fonds s’enrichit très rapidement et la simplicité de notre recherche fait la joie de milliers de juristes tous les jours. Nous venons d’ouvrir les inscriptions à la version premium, il y a eu 600 inscrits le premier jour.
Merci Nicolas Bustamante pour cette interview.
LW
LOL les start-up qui prônent l’Open Data pour justifier leur appropriation de milliard de données publiques et puis …. vous en font payer l’accès.
Il faut espérer que cela s’améliore Gildas. Peut être avec le RGPD et la loi de programmation de la justice!!
Je suis on ne peut plus d’accord avec vous, notamment sur le fait que Doctrine.fr constitue un moteur de recherche par excellence pour les prestataires juridiques. Mais je trouve que le fait qu’il soit payant n’est pas très intéressant.
Un moteur de recherche juridique, vous dites ? Je trouve qu’il y a de plus en plus de moteurs de recherche très spécifique de la sorte. Et je pense que ce sont les étudiants qui vont en bénéficier davantage.
L’« Open data » est un concept qui gagne de plus en plus de terrain en ce moment. Seulement, je crois qu’il doit toujours y avoir des restrictions. On peut voir les généralités sur un domaine précis, mais ça doit rester là, vous ne pensez pas ?